Où je parle notamment d’“Oh my ghostess”…

L’amitié homme-femme n’existe pas.
J’ai réentendu cette phrase hier, au détour d’une comédie romantique. Ça n’avait rien de surprenant, ça allait dans l’histoire, le héros est jaloux du meilleur ami de l’héroïne.
Ça allait dans cette histoire, mais c’est tellement bête…
L’amitié homme-femme n’existe pas ?
Alors… déjà, cela présuppose un cadre hétéronormé et ça doit se décliner ? Les bisexuels n’ont aucun ami ? Et, pour les asexuels, c’est la fête ?
En fait, cette bêtise est lourde de sens parce qu’elle pose bien en définition que l’amour est l’amitié-avec-du-sexe. Amour et amitié ne seraient donc pas des concepts qui représenteraient une intensité de relation, mais qui seraient définis par la présence ou l’absence de sexe.
Beaucoup de couples qui “fonctionnent” disent qu’ils sont “meilleurs amis”. S’ils emploient ce terme de “meilleur ami”, c’est bien qu’il signifie quelque chose de particulier à leurs yeux qu’ils ne peuvent pas rendre par “nous sommes amoureux”.
Et, sinon, on en reste là : ce serait de l’amour si on trouve une personne juste sympa et qu’on veut coucher avec elle, mais de l’amitié si on a un lien très fort avec quelqu’un, mais qu’on n’a jamais songé à le sauter ? Et on a inventé « amour platonique » pour se filer des maux de tête ?
Les mots nous servent à communiquer, à échanger. Pour qu’ils soient utiles, nous devons être d’accord sur leur définition. “Table” ou “chaise” font normalement consensus.
“Amour” et “amitié” n’ont juste aucun sens. Ils ne servent à rien. Ou, plutôt, ils ne servent qu’en fiction, quand on utilise des clichés.
– Et, du coup, on fait quoi ?
– Aucune idée…

J’ai récemment regardé le drama Oh my ghostess et je vais largement spoiler dans ce qui va suivre. Du coup, je préviens même si je ne vois pas trop la notion de spoiler dans une histoire romantique, on sait très bien que le méchant sera attrapé et les amoureux ensemble à la fin, mais bref…

Oh my ghostess
Lui est chef cuisinier, arrogant, solitaire.
Elle1, introvertie parce qu’elle voit les fantômes, travaille pour Lui et en est secrètement amoureuse.
Elle2 est morte brutalement et erre en fantôme, persuadée que le gros regret qui la retient sur Terre est qu’elle était vierge. Du coup, maintenant qu’elle est morte, elle n’a plus aucune timidité face aux hommes.
Elle1 et Elle2 ont des énergies (essences ?) très en phase, négatives. Lui possède une énergie positive dont elles ont besoin.
Comme Elle1 ne se sent pas d’aborder Lui, elle laisse Elle2 la posséder.
Je suis allée voir quelques critiques de la série et l’une d’elles m’a frappée parce que j’ai ressenti (instinctivement) la même chose : Elle2 possède Elle1 trop longtemps, les deux personnages n’alternent pas assez, si bien que ce qu’on ressent, c’est que Lui est amoureux d’Elle2 et pas d’Elle1 (ce qui est contraire au but de l’histoire — et l’argument-tristesse même d’Elle1 a un moment).
Sauf qu’il y a une autre lecture. Et que, au choix, elle est tirée par les cheveux (si on s’en tient à la définition de l’amour telle qu’on nous l’impose) ou elle marche parce que ça fait sens.
Lui est attiré par Elle1 parce qu’elle est petite et fragile (il pense à elle comme “un petit chiot’ — no comment) et par Elle2 parce qu’elle est sexuellement entreprenante. (Et les trois partagent une passion commune pour la cuisine.) C’est d’ailleurs résumé quand une journaliste lui demande sa femme idéale : “timide le jour et chaude la nuit”.
Plusieurs fois, on nous explique que les deux jeunes femmes se ressemblent beaucoup : Elle2 est devenue entreprenante après sa mort, parce qu’elle a compris qu’on ne vivait qu’une fois, toussa toussa. Elles ne sont pas différentes l’une de l’autre, elles ne sont juste pas au même moment de leur évolution (petit chiot, pokémon…) et Lui ne couchera pas avec Elle1 tant qu’elle n’aura pas évolué, en fait. Avant cela, il l’aime en lui tenant la main et en la surprotégeant.
– Du coup, où veux-tu en venir ?
– Si le marqueur de l’amour est le désir sexuel, alors, effectivement, Oh my ghostess a une énorme faille scénaristique parce que Lui est tombé amoureux d’Elle2 et rater l’aspect amoureux d’une comédie romantique, ben, c’est le plus gros fail.
Si le désir sexuel n’est que le piment de l’amour, alors Lui est amoureux d’Elle1 qui réveille ses instincts protecteurs (c’est pas mon truc, mais chacun a ses raisons d’aimer) et il ne fait que désirer Elle2. Et il désirera Elle1 quand sa libido à elle se réveillera.
Quand j’étais petite (enfante ? ado ?) et que je lisais, je détestais la description du désir sexuel qu’on faisait chez l’homme. On me disait d’un côté que l’homme devait désirer la femme qu’il aimait, mais que c’était un animal qui sautait sur tout ce qui bouge, qui désirait toutes les femmes belles, etc.
J’avais la tête farcie de clichés qui n’avaient aucune logique et auxquels j’essayais de trouver un sens. La notion d’amour me rendait malade car elle était farcie de sexe.
(Ça me mettait même mal à l’aise avec la notion de « femme belle », comme si les femmes étaient classées en fonction de l’intérêt sexuel que les hommes leur portaient — ce qui est bien ce que la société voudrait, en fait.)
(Spoiler : Toutes les femmes sont belles. Pour elles-mêmes, pour leurs copines, leurs sœurs, leurs mères… et les hommes n’ont juste rien à voir dans l’histoire.)
Jeune adulte, j’ai longtemps considéré qu’un homme devait être beau/désirable, que l’attachement se mesurait au désir sexuel…
Ces derniers temps, j’ai regardé beaucoup de séries coréennes et les deux marqueurs (fictionnels, je ne sais pas la réalité sur place) de l’amour très très fort sont “se tenir la main” et “se prendre dans les bras pour se consoler”.
– Et du coup ?
– Je suis incapable de dire si Oh my ghostess me plaît ou me déplaît. J’aime bien les histoires de fantômes, il y a le meurtre d’Elle2 à résoudre, Jo Jeong-seok (qui joue le héros) a un charme très particulier… mais je n’ai aucune idée de si l’histoire d’amour a été mal pensée et bugue ou si, au contraire, c’est une bonne réflexion sur la nature de l’amour… d’autant qu’Elle1 a une histoire d’amitié avec l’un de ses collègues (incarné par Kwak Si-yang qui est un sacré beau gosse) et dont ils n’ont pas fait un triangle amoureux, ce qui laisse penser que tout a été voulu délibérément.

Extraordinary You (2019)

Fin novembre, j’ai avalé d’une traite W: Two World Apart que j’ai adoré.
J’avais repéré Extraordinary You dans le même genre de thématique (les personnages sont ceux d’un univers fictif/d’une bande dessinée), mais je viens seulement de l’attaquer… et de la finir.
Elle (Kim Hye-yoon), lycéenne riche, belle, intelligente, adorée de son père, mais atteinte d’une grave maladie, découvre… qu’elle n’est qu’un personnage secondaire dans une (mauvaise) bande dessinée, bourrée de clichés, de répliques réutilisées à l’infini… et, puisqu’elle doit probablement bientôt mourir d’une maladie cardiaque, elle décide que le temps qui lui reste ne peut pas être gâché à poursuivre un amour à sens unique qu’elle n’éprouve même pas.
Lui (Rowoon) n’est même pas un personnage secondaire, c’est à peine un figurant sans nom et, parce qu’il est peu important, il échappe à l’attention de l’auteur et peut changer les évènements.
Seul le thème général est proche de W. Ici, il n’y a pas d’action (pas de meurtres, pas de courses-poursuites), on est dans la romance. Mais une drôle de romance puisque l’auteur force les personnages dans des relations qu’ils n’ont pas choisies. Pas non plus de passage entre monde fictif et monde réel : les héros affrontent un auteur qui leur veut du mal et qu’on ne voit pas, dont on sait seulement qu’il est assez médiocre, réutilisant clichés, répliques et personnages pour un tout sans intérêt. Donc pas vraiment de Grand Méchant ou alors le Grand Méchant ultime puisque c’est le dieu de ce monde…
L’ambiance est vraiment réussie : les décors sont « juste ce qu’il faut » de factice, avec un petit côté « scène de théâtre ».
Même si ma lecture en est loin (et donc très floue dans ma mémoire), j’ai beaucoup penser à Jasper Fforde/Thursday Next. Les personnages alternent vie sur scène où ils sont contraints dans leurs gestes et paroles, mais pas dans leurs pensées, et vie dans l’ombre/en coulisses où seuls les « conscients » se souviennent de ce qu’ils vivent.
Bref… à consommer de toute urgence si ce n’est pas déjà fait 🙂

Ce billet est également paru dans la Tribune des Vagabonds du Rêve.

The Tale of Nokdu

Il vit sur une île isolée, avec son père et son frère, quand un groupe d’assassines tente de les zigouiller. Son enquête le conduit dans un village de veuves, qui abrite le groupe d’assassines, et il se déguise donc en veuve pour en apprendre plus. Il fait la rencontre d’Elle dont la famille a été tuée et qui a été recueillie par la maison des courtisanes qui travaille en symbiose avec le village des veuves.
Pour qu’Elle ne devienne pas courtisane, Il paie et l’adopte en tant que mère. Ils se disputent et s’aiment.
Puis ils quittent le village pour mener chacun leur quête (lui son enquête, elle sa vengeance), il devient garde royal, elle devient servante…
Le rythme est assez curieux : on est toujours sur du 16 grosses heures, mais par épisodes de 30 minutes.
L’histoire évolue beaucoup : la vie au village des veuves, lui cachée en tant que femme, la vie à la capitale, etc.
J’ai aimé la simplicité avec laquelle Lui devient une femme, sans se prendre la tête, sans se sentir menacé dans sa virilité et en restant le grand guerrier.
Le truc « en plus » de cette histoire, c’est le lien entre les personnages : au fil des épisodes, une famille disparate se compose, adoptant sur son passage tous ceux qui sont seuls et qui vont aider.
Et des méchants rongés par leurs folies et faiblesses.
Ici, les gentils ne sont pas les gentils parce qu’ils sont too much, mais juste parce qu’ils sont sains et ont compris le vrai sens de la vie.

Mâle, mon héros

Je suis née dans les années 1970. J’ai été amoureuse d’Indiana Jones et d’Han Solo. (De Raistlin, également, et de Sherlock Holmes, mais c’est une autre histoire 😉 ) Je n’ai pas été horrifiée que Jones capture une petite poulette de son fouet. Je voudrais bien vous raconter que, très tôt, j’ai remis en cause le modèle du couple monogame hétérocentré, mais ça n’est pas du tout le cas. C’était le Modèle et même si, confusément, je sentais bien qu’il ne me correspondait pas, à moi, personnellement, ça venait forcément de moi. J’ai aimé les bad boys. En fiction, parce que, irl, faut pas déconner non plus.
Ma première grosse claque narrative, je pense que c’est Buffy contre les vampires. Il y a eu un avant et un après.
Et puis un jour, après des années à se farcir la télévision classique et ses programmations déplorables (épisodes dans le désordre, diffusion tardive…), la bonne qualité des connexions internet a changé tout ça.
Et puis il y a eu Netflix : on peut pester contre les grandes compagnies, mais il y a eu là aussi un avant et un après. J’ai probablement souscrit à l’abonnement pour The Good Place à l’été 2018. Tout de suite, je suis tombée sur Love in the Moonlight et A Korean Odyssey.
Si j’ai trouvé le premier charmant (je n’ai jamais caché mon attrait pour les comédies romantiques), le deuxième a été une nouvelle claque : j’ai pris davantage conscience de mon inculture (non, je ne savais rien de la Pérégrination vers l’Ouest et, oui, j’ignorais que le petit garçon avec une queue de singe dans Dragon Ball était le roi-singe), mais j’ai aussi été littéralement séduite par cette fantasy mythologique et le questionnement sur l’amour. Lui est un dieu qui veut la manger, Elle, mais en est empêché seulement par un objet magique qui l’oblige à tomber amoureux. Que vaut cet amour forcé ?

70 dramas plus tard…
Tandis que, vendredi soir, une académie de vieux mâles blancs sacrait l’un des siens, indifférente à la saine indignation que cela allait déclencher à travers le monde, je binde-watchais Her Private Life. Le genre de comédies romantiques sur lesquelles je n’aurais pas fait un billet. Parce que c’est mignon, mais ça me fait plaisir à moi, je n’ai rien à en dire particulièrement.
Sur les réseaux sociaux, on parlait de ces prédateurs dont le visage monstrueux ne nous saute aux yeux que désormais, après #MeToo, et, de l’autre, j’avançais dans une série tendre où le héros… hé bien… est juste… un homme ? Pas un prédateur, un homme.

Pause
Je n’ai remis en question le Modèle que très récemment.
#MeToo a été une révélation pour moi car, comme la majorité d’entre nous, j’avais considéré normaux des comportements qui ne l’étaient carrément pas. Et, comme pas mal d’entre nous, j’ai lu la mauvaise foi au fil des commentaires imbéciles : comment peut-on séduire si on n’a plus le droit de contraindre l’autre ?
Les baisers volés ? J’avais toujours eu en tête les paroles d’Alain Souchon.
Et puis, y’a pas longtemps, parce qu’un garçon me plaisait vraiment beaucoup, des (plusieurs) copines (bien intentionnées) m’ont demandé pourquoi je ne lui volais pas un baiser, justement. Pourquoi je ne lui offrais pas un verre ou deux, m’habillant « légèrement »…
Pourquoi ?
Parce que, du coup, pour établir la confiance avec ledit gars, je le sentais super moyen.
« J’ai envie de t’embrasser ; est-ce que c’est réciproque ? Et, même si c’est réciproque, mais que tu ne peux pas, pour des raisons qui t’appartiennent, ben, ça s’arrête là. »

70 dramas plus tard…
Je ne parle pas de société. Je ne connais pas (vraiment) la société coréenne et je me doute qu’elle n’est pas forcément tellement plus tendre que la nôtre envers les femmes.
Je parle de fictions. De narrations.
Parce que nos modèles commencent avec les fictions.
Je ne sais pas combien j’ai pu regarder de films et de séries depuis ma naissance, lire de livres… mais je fais le pari que la majorité était française ou américaine.

70 dramas coréens plus tard…
Alors, oui, Lui est très riche. Le syndrome de Cendrillon ? Je ne trouve pas. En général, Elle est méritante, intelligente, cultivée malgré le coût des études.
Lui pleure, facilement, souvent. Il est beau et érotisé, mais il n’est pas un objet sexuel.
Il ne l’embrasse pas de force. Il lui demande sa permission, il attend.
Même s’il a très très envie d’Elle car ils sont très très amoureux, il s’assure qu’Elle sait bien ce qu’ils vont faire, qu’Elle est pleinement d’accord.
Comment peut-on séduire si on n’a plus le droit de contraindre l’autre ?
Alors j’ai un secret pour vous : la question est totalement autre.
Comment se fait-il que les modèles occidentaux ne soient plus séduisants du tout après quelques dramas ?

A l’est, Her Private Life.
C’est une « simple » comédie romantique.
Elle travaille dans une galerie d’art, Il devient son chef et ils tombent amoureux et… Le genre de comédie que j’apprécie, mais dont je me doute que ça n’intéresse pas grand monde ici 😉
Sauf que le héros est l’anti-prédateur et que ça fonctionne super bien.
Elle a un secret : sur son temps libre, elle est la fan la plus investie d’une idole qu’elle suit partout, prend en photo… ce qu’elle ne veut surtout pas qu’on découvre, de crainte de casser son image « lisse » de conservatrice.
Lui, sur un malentendu, pense que son secret est qu’elle est lesbienne (en couple avec sa meilleure amie) et il va donc protéger cette vie privée qu’il pense menacée.
Bien sûr, ce malentendu est un prétexte pour démarrer leur histoire de façon humoristique, mais, en fait, au delà du malentendu cocasse, le traitement en est très tendre : pas un instant, tant qu’il la croit lesbienne, il ne la voit en tant que femme et il veut s’assurer de protéger son employée comme minorité menacée par une société conservatrice. Et, quand il découvre qu’elle est hétéro, ils ne se sautent pas dessus.

– Ben, quoi, c’est normal, non ?
– Oui, c’est normal. Mais cette normalité est agréable. Cet homme est complètement un anti-prédateur et c’est juste incroyablement romantique.
– Ouais, ben, moi, je trouve ça juste normal.
– Tu as raison. Mais j’aime les comédies romantiques tendres bourrées de consentements.

A l’ouest, Cinquante Nuances de Grey.
Bon, oui, je sais, je n’ai ni lu le livre ni lu le film. Sorry.
Je suis pleine de préjugés.
De préjugés qui me disent que ça ne parle pas de respect et de consentement.

La Matrice
Quand on a ouvert les yeux, on ne peut plus revenir en arrière.
Je suis de celles qui, longtemps, n’ont pas vu ce qui clochait. Parce qu’il y avait un Modèle et c’était comme ça. Et même s’il n’était pas le mien, c’était celui qui était. Je devais me protéger, moi, perso, mais je n’avais aucune idée du Système. Aucune idée que les fictions peuvent le nourrir ou le rendre obsolète.
Aucune idée que, un jour, je ne pourrais plus du tout mettre les mêmes idées derrière « comédie romantique ».
Est-ce tout simplement pour cela que la pop-culture coréenne séduit autant les jeunes femmes ? En tout cas, si certains vieux mâles occidentaux ne voient pas comment on peut draguer, elles, elles le visualisent très très bien !

Aujourd’hui, je ne renie pas Indiana Jones, je l’ai aimé. Mais j’aurais probablement un petit sourire gêné face à lui et je déclinerais poliment son invitation à dîner.
Et, ça, je ne l’avais vraiment pas vu venir.
Ceux qui n’évoluent pas disparaissent. La masculinité va changer. Elle sera respectueuse et tendre et ceux qui rateront le virage se mangeront un mur.

Rendez-vous dans quelques années 🙂
Pour ma part, je ne sais vraiment pas comment j’écrirai l’amour demain, mais je sais que plus rien ne sera jamais comment avant…
/musique de fin

My Holo Love (2020)

Une fois n’est pas coutume, je peux m’imaginer que je suis l’actualité puisque My Holo Love est sortie vendredi dernier sur Netflix, Netflix qui la présente comme une « mini-série ».
Alors je ne veux pas être trop psychorigide (si, si, je le suis et j’assume !), mais en quoi 12 épisodes au lieu des 16 en moyenne peut justifier le qualificatif de « mini » ?

Lui est un informaticien de génie, hacker, qui souffre d’un handicap qui l’empêche de se lier aux autres (enfant, il ne parlait pas — il est persuadé que sa mère s’est suicidée car il était un fardeau). Son meilleur ami est donc Holo, une IA-hologramme qu’il développe et qu’il va bientôt commercialiser.
Elle souffre de prosopagnosie. Pour ne pas être moquée, elle cache sa maladie, mais, du coup, elle passe pour une égoïste pimbêche.
« Par hasard », elle se retrouve bêta-testeuse d’Holo, implantée dans des lunettes, et cela lui change littéralement la vie (puisque l’IA lui indique qui est qui). Puis elle finit par s’en éprendre car Holo est attentionnée et se comporte comme un véritable ami.
Le Grand Méchant, forcément, veut voler cette technologie.

Et on obtient une sympathique série de SF parce que le tout est agréablement équilibré :
la SF, le rapport à la technologie : comment elle peut nous épauler, mais également comment elle peut nous accaparer (Holo, lancée sur le marché, se révèle très addictive pour les utilisateurs) ;
l’amitié et l’amour, IA et humains : Elle est-elle amoureuse d’Holo ou de son créateur qui l’a conçue à son image ? Les sentiments de l’IA sont-ils réels ?
le mystère : pourquoi la mère de Lui est-elle morte ? qui veut voler l’IA ?

Bref, rien à dire de plus sinon : faites vous plaisir, regardez 😉

Ce billet est également paru dans la Tribune des Vagabonds du Rêve.

Tempted (The Great Seducer)

Je vais commencer par un préambule : je veux des happy ends. OK, il y a tout un tas de bons arguments pour démontrer qu’une happy end n’est pas indispensable, mais, perso, je n’ai pas envie de me farcir seize heures (longueur moyenne d’un drama) avec des persos pour que, à la fin, ils meurent écrasés par un tractopelle. Notez qu’en plus je ne suis pas difficile : je prends les fins ouvertes (difficile, vu mes propres histoires, de les renier) et mourir en sauvant la galaxie est une happy end. Juste, voilà, ne me faites pas vivre des heures auprès de gens pour les massacrer à la fin.
Tout ça pour dire que, même si Tempted est librement inspiré des Liaisons dangereuses, aucun personnage ne meurt de MST à la fin 😉

Au départ, je n’avais pas prévu de parler de cette série car elle m’a laissée une impression mitigée et puis, au final, en y repensant, l’impression qui me reste, qui domine, est une sorte de tendresse à partager.
Si-hyeon, Su-ji et Se-ju (oui, la similitude des deux noms est visiblement voulue, mais c’est une vraie galère à suivre 😛 ) sont trois amis, trois jeunes adultes fusionnels, cruels et tristes. Leur trio est leur force, face à la vie, aux difficultés, mais les enferme aussi, forcément.

Lorsque Gi-yeong (le seul vrai salopard de l’histoire) éconduit cruellement Su-ji, celle-ci demande à Si-hyeon, pour se venger, de séduire Tae-hee, le grand amour du méchant, pour ensuite la larguer.
Si-hyeon s’exécute, par affection pour son amie, et… forcément, s’éprend de Tae-hee.
Su-ji, qui était en réalité amoureuse de Si-hyeon, va en souffrir ; Se-ju, qui était amoureux de Su-ji…
Bref, rien de trop original a priori.
Le charme prend par la juxtaposition des générations : si les vingt-ans souffrent et sont mal, c’est également parce que la génération de leurs parents souffre et va mal. Les histoires s’entremêlent donc dans une sorte de malaise mélancolique dont personne ne trouve la sortie.

Tae-hee (et son père) représente la sage au milieu des fous. Intelligente, sure d’elle, elle est presque un peu too much au milieu des losers. (A noter que les deux persos sont ceux qui ont vécu « ailleurs » — en Allemagne — comme si cela les avait insensibilisés aux soucis locaux de bien marier son enfant, par exemple.)
Si-hyeon (je dirais que lui est le héros alors que Tae-hee endosse plus le rôle de la quête) est extrêmement touchant, rongé par la culpabilité : que vaut sa relation puisqu’il a abordé celle qu’il aime de mauvaise façon (il a enquêté sur elle pour l’arnaquer) pour de mauvaises raisons ?

Au final, je crois que j’ai été touchée par la façon dont les gens se perdent dans leurs propres nœuds. A un moment, Tae-hee dit quelque chose comme “les secrets n’ont d’importance que pour les gens qui veulent les préserver”, genre tout le monde s’en fout de ce que vous voulez dissimuler.

Une série ni drôle ni gaie, touchante, pas addictive, mais bien jouée/réalisée.

Guardian: The Lonely and Great God (2016)

En commençant à m’intéresser aux séries coréennes, j’ai très rapidement entendu parler de Goblin (l’autre titre de la série — c’est assez fascinant le nombre de titres qu’on trouve pour une même oeuvre) qui raconte l’histoire d’un dokkaebi (et pas du tout d’un gobelin — à quelle époque reculée quelqu’un a-t-il cru bon de traduire l’un par l’autre ???) et j’étais forcément curieuse d’une histoire portant le nom d’une créature mythique. Mais je suis paresseuse et la série n’est pas diffusée sur Netflix. Puis, récemment, j’ai pris un abonnement à Viki et j’ai donc enfin satisfait ma curiosité.

Alors… même si ce n’est pas l’histoire d’un gobelin, on est bien dans de la fantasy :
Il y a environ 900 ans, un Général était si puissant qu’il a fini par devenir un dieu (littéralement) de la guerre pour le peuple, mais le Roi, mariée à sa Sœur et conseillé par le très vilain Méchant, jaloux qu’un simple général puisse passer pour l’équivalent d’un dieu, le tue (et sa sœur aussi, il fait un lot groupé).
A sa mort, le Général est transformé en dokkaebi et la vie ne pourra lui être ôtée que par sa fiancée (i.e. s’il rencontre l’amour).
C’est simple, classique et ça fonctionne.
A notre époque, le Général sauve la vie d’une femme enceinte et de l’enfant qu’elle portait. Ledit enfant, par cette magie, devient sa Fiancée, fiancée qui n’est même pas inscrite dans les registres de la Mort puisqu’elle n’aurait pas dû venir au monde/n’avait même pas de nom.
La Fiancée échappe aux faucheurs, atteint le bel âge de 19 ans, rencontre le Dokkaebi qui vit désormais en coloc avec un faucheur…

Le tout forme un récit très sympa de fantasy, avec des trucs cools, genre le voyage à travers les portes (mais pourquoi parleraient-ils anglais au Québec et alors même que toutes les pancartes sont en français ?), le Dokkaebi qui fait pleuvoir dès qu’il est morose (et pourrit la vie des gens ordinaires), des interventions divines bien gérées…
A vrai dire, je ne peux que vous invitez à voir cette série sympa, mais… certaines choses m’ont pourtant vraiment agacée et font que, même si j’ai bien aimé, ce n’est pas le grand frisson. Sauf que, pour le coup, impossible à expliquer sans SPOILER donc je vous invite à stopper ici votre lecture si vous ne souhaitez pas en savoir plus pour le moment…

[SPOILERS EN APPROCHE]

Un des gros ressorts narratifs de cette histoire est donc la mort et la réincarnation.
On découvre (on devine assez tôt, je dirais) que le Faucheur est la réincarnation du Roi et, comme de bien entendu, il s’éprend de la réincarnation de la Sœur. Quand Roi et Sœur retrouvent leurs souvenirs, cela ne fait que confirmer leur amour, mais également l’impossibilité de le vivre : le pardon a des limites, disons, et le Roi a quand même assassiné sa femme.
Pour ces deux personnages, OK, la seule issue possible est la mort/réincarnation avec l’effacement des vies passées.

Mais ce n’est pas parce que ça marche pour eux que ça marche pour tout le monde !
Le Dokkaebi meurt une première fois quand sa Fiancée a 20 ans, mais, comme il est badass après tout, il erre dans un endroit qui n’est pas répertorié (un truc du genre — c’est idiot, mais ça me fait penser à l’un de mes propres textes, l’Ange sur la traverse, où le personnage est perdu, mais pas vraiment en Enfer) jusqu’à ce que sa Fiancée, dont la mémoire a été effacée, le rappelle quand même (parce qu’ils ont signé un contrat).
Il doit lui redonner ses souvenirs et, franchement, jusque là, j’ai marché.

Sauf que… le lendemain de leur mariage (elle vient d’avoir 29 ans), elle meurt dans un accident de voiture pour sauver plein de gentils petits enfants (et c’est très bien).
Sauf qu’elle refuse de boire le thé de l’oubli (que les faucheurs servent aux morts pour effacer leurs vies passées) et elle peut donc tranquillou se réincarner et retrouver son chéri (alors qu’il devrait y avoir des conséquences si on refuse de boire ce thé, non ???).
Je n’ai absolument rien contre les fins heureuses, hein… mais, par contre, je trouve insupportables les ressorts narratifs qui ne servent à RIEN : si elle n’a pas la mémoire effacée, qu’elle meurt ou pas, quel intérêt ? Genre le seul suspens, c’est si elle va mettre longtemps à se réincarner et, sérieusement, pour un gars qui a vécu plus de 900 ans, attendre 30 ou 40 ans, est-ce vraiment une différence notable ???
La Fiancée réapparaît quand même des années plus tard dans le même costume de lycéenne, hein ! Et elle lui demande s’il la reconnait. Sérieux ?

Bref, il y a vraiment des trucs bien sympas, mais il y a un manque de maîtrise, genre de chouettes idées, mais personne n’a relu ou un truc comme ça.
Ou un auteur qui n’a pas su poser le mot FIN. Parce que, par exemple, c’est très mignon que le Roi et la Sœur puissent s’aimer dans une vie prochaine, mais… on le sait déjà quand on les voit franchir la porte de la Mort main dans la main. On n’a pas réellement besoin de voir leur prochaine vie.

Voilà, très sympa, mais ça a manqué d’un stylo rouge qui coupe de gros morceaux… et, au fond, ça m’agace parce que ça pourrait être vraiment top sinon.

Ce billet est également paru dans la Tribune des Vagabonds du Rêve.

Qu’est-ce qui cloche chez la secrétaire Kim ? (2018)

Alors… avant toute chose, que ce soit clair : je fais partie de ces gens qui regardent les comédies romantiques de Noël. Parce que, oui, c’est bébête, oui, c’est téléphoné… mais ça fait du bien de regarder de temps en temps des trucs 100 % gentils, 100 % innocents… et, clairement, cette série allie le feel good des comédies sentimentales de Noël avec la qualité pro (acteurs, lumières…) de pas mal de dramas coréens.
L’histoire et les persos sont totalement irréalistes, il n’y a pas l’ombre d’un soupçon du moindre méchant ou antagoniste… mais j’ai souvent ri et j’ai vraiment adoré.
Lui (Park Seo-joon), 33 ans, est juste… parfait ? Beau, riche, précoce… il est en fait totalement narcissique. Il admire son reflet dans le miroir, ne sort avec des filles que comme faire-valoir aux réceptions.
Elle (Park Min-young), 29 ans, est sa secrétaire. Elle a commencé à travailler dès sa sortie du lycée pour payer les études de ses sœurs et rembourser les dettes de son père. Si Lui est parfait, Elle est réellement parfaite puisqu’elle n’est même pas narcissique.
Et donc, à 29 ans, en travaillant comme une malade sans jamais prendre de jours de repos, elle a remboursé toutes les dettes familiales et elle décide donc de démissionner pour découvrir ce qu’elle aime réellement faire et avoir le temps d’aller à des rendez-vous galants si elle ne veut pas rester éternellement célibataire.
Sa démission est forcément le déclencheur : jusqu’à présent, Elle lui appartenait totalement puisqu’il l’appelait le soir et le week-end. Si elle démissionne, elle en épousera un autre.
Lui, dont on comprend qu’il a toujours été amoureux d’elle, la demande immédiatement en mariage, mais ça ne passe pas, forcément…
Le héros est affreusement narcissique, mais n’a pas une once de méchanceté ou de perversité (le côté irréaliste des persos qui font de l’ensemble un conte rigolo).
J’ai ri bêtement aux mésaventures de son meilleur ami qui doit subir ses confidences et une secrétaire si maladroite qu’on est à la limite de la tarte à la crème.
Tous les persos sont ridicules et touchants.
Bref, étrangement, je trouve l’ensemble particulièrement réussi.

W: Two World Apart (2016)

Le résumé disait : « Après avoir été aspirée dans le monde du webtoon de son père, une interne en chirurgie se retrouve prise dans une mystérieuse histoire de meurtre impliquant le héros. »
Je l’avais repéré, mais sans plus et puis, y’a pas longtemps, Mère Dragon me dit qu’elle a adoré, que c’est vraiment bien… alors j’ai commencé à regarder… jeudi soir ? et j’ai fini hier soir.
Et c’est juste un très gros coup de cœur.
Pour refaire un peu le résumé, un auteur tente de tuer son héros après l’avoir mené en bateau depuis des années (i.e. l’auteur ne sait absolument pas qui est le tueur sur lequel le héros enquête), mais le héros s’accroche à la vie… et à la fille, médecin, de l’auteur qui passait près de la tablette graphique de son père.
Et c’est juste absolument… super bon.
Y’a les mondes parallèles, le héros, doté de tonnes de qualités, qui émet des hypothèses sur les liens entre les mondes pour s’en sortir, la problématique de l’auteur-dieu, du suspens, des méchants très méchants…
Le truc, en fait, pour vous donner un ordre de grandeur sur l’échelle de mes goûts, c’est que j’ai regardé les deux premières saisons de Stranger Things quand elles sont sorties… parce que, en fantastique, perso, je pense qu’il n’y a pas grand chose à se mettre sous la dent.
Genre je les ai regardées faute de mieux, avec les mondes parallèles, toussa. Parce que, au fond, moi, ce que j’aime, c’est le fantastique. Je n’ai toujours pas regardé la saison 3.
Elle est dans ma liste, hein… mais, quand je vois une série comme W: Two World Apart, ben… Stranger Things m’ennuie, tout simplement.
Après, clairement, j’apprécie pas mal de choses dans les séries coréennes, les méthodes narratives, le découpage assez fréquent en 16 épisodes de 60+ min. et puis on boucle, etc.
Bref, je ne vois pas comme un écrivain pourrait ne pas aimer ce truc 😉

Ce billet est également paru dans la Tribune des Vagabonds du Rêve.

Conclure 2 : le retour

Parce que Mère Dragon m’en a dit le plus grand bien, hier, j’ai commencé à regarder la série coréenne W: Two Worlds Apart.
N’en étant qu’aux premiers épisodes, je ne risque pas de vous spoiler. L’Héroïne, médecin, est la fille d’un Auteur, rendu célèbre avec une BD « W » qui raconte l’histoire d’un jeune Héros dont la famille a été brutalement assassinée et qui devient riche et célèbre pour retrouver le coupable. Mais, en réalité, Auteur n’a aucun idée du coupable et, ne s’en sortant pas de son intrigue, décide de tuer brutalement son Héros… qui va être sauvé par Héroïne, happée dans l’histoire via la tablette graphique de son père.
Si l’Héroïne a été happée par l’histoire elle-même, j’avoue que j’ai été happée très vite par l’intrigue. Parce que j’adore le côté méta : Héros a conscience que ce qui lui arrive manque de contexte (Auteur le fait poignarder, empoisonné par une infirmière qui n’a aucun mobile, lance un énorme camion sur lui) et qu’il ne peut pas retrouver les coupables car il n’y a jamais de mobile. Auteur est pris à la gorge car, au fond, il le sait, son histoire n’a aucun sens.
Et, quand Auteur et Héros se confrontent (oui, oui, assez tôt dans la série puisque je n’en suis qu’au début), Auteur avoue que la famille du Héros n’est morte que pour le côté dramatique, sans aucune vraie raison.

Mais pourquoi je vous parle de tout ça, moi, ce matin ?
Dans un précédent billet, je m’interrogeais déjà sur les fins et je pense toujours que la fin d’une histoire d’amour ne peut pas être la même, par exemple, que la fin d’un polar.
Mais, en fait, surtout, je pense qu’il devrait exister un Enfer pour les auteurs qui commencent une histoire sans en connaître la conclusion (à côté de l’Enfer de ceux qui font « répondre à tous » et de l’Enfer de ceux qui mettent des tableaux inclus dans leurs méls et non en PJ exploitable). Et ils sont nombreux.
Parce qu’ils ont un contexte et des personnages, ils pensent que ça suffit, que la fin viendra bien toute seule, qu’ils verront quand ils y seront. Et, toi, au final, lecteur/spectatrice, tu te retrouves, après des heures de lecture/visionnage, à hurler toute seule dans ton salon : « WTF ??? »
Parce que, non, ça ne donne jamais rien de bon si tu ne connais pas la fin. Je ne dis pas que tu n’as pas le droit de te laisser un peu de temps pour la trouver, mais je dis que tu ne peux pas présenter ton travail tant que ce n’est pas fait.

J’écris peu. Parfois, honnêtement, j’en souffre parce que je suis conditionnée comme les autres à mesurer mon taf à la taille. Et on sait bien que c’est la taille qui compte.
Mais, en réalité, je sais que, quelques soient les personnages qui viennent me visiter le soir avant que je ne m’endorme, quelques soient les contextes, les bouts de dialogue… qui s’imposent à moi… je ne vais pas au bout tant que je n’ai pas une fin qui me satisfasse.
Je peux avoir des goûts de m…, mes fins peuvent être nazes et tout ce qu’on veut, mais, pour moi, je veux connaître la fin.

En y repensant, quand j’étais petite, je lisais toujours les dernières pages des romans policiers, à la grande incompréhension de Mère Dragon. Et je n’ai pas fondamentalement changé. Il y a quelques jours, j’ai vu la moitié de Cheese in the Trap que j’ai abandonné là sans remords car, en jetant des coups d’œil sur la fin, j’ai réalisé que c’était l’histoire d’une relation toxique et que le héros s’en repentait bien trop tardivement.

Vous pouvez retourner à vos achats de Noël.